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Coupe du monde au Qatar : entre boycott et amour du sport.

Dernière mise à jour : 17 nov. 2023

Dimanche 20 novembre, le coup de sifflet a résonné, le coup d’envoi est lancé : c’est le début de la coupe du monde 2022. Cet événement, les fans du ballon rond, les passionnés de sport, et finalement le monde entier l’attendait depuis quatre longues années. Mais, est-il comme nous l’avions imaginé ? Impact environnemental, coûts astronomiques, morts de travailleurs et non-respect des droits de l’Homme : la Coupe du monde 2022 - en apparence événement sportif - prend une tournure géopolitique lourde.


Attribué en 2010, le Qatar devient le premier pays de la péninsule arabique à organiser le mondial, et désire faire ses preuves. Au sein du golfe Persique, ce petit État se prépare depuis maintenant une décennie, à accueillir l’un des événements sportifs les plus notables de la planète. Pays en pleine croissance, tant économiquement qu’en terme de démographie, il a su s’imposer comme un Émirat riche, avec un PIB par habitant dépassant 60 000 dollars en 2021. D’une superficie de 11 571 km² (comparable à l’Île-de-France) et habité par 2.9 millions de personnes, le Qatar est sujet aux critiques quant à son régime autoritaire et trop conservateur selon la vision occidentale.

À la veille du lancement de la Coupe du Monde 2022, le Qatar est pointé du doigt. Malgré les accusations contre le pays, des efforts considérables furent entrepris pour accueillir le mondial. Les joueurs et leurs fans sont accueillis par un complexe composé de huit stades, dont six fraîchement construits, d’une capacité allant de 40 000 jusqu’à 80 000 spectateurs.


Par exemple, le stade Al Bayt peut en recevoir 60 000 et contient également 96 suites luxueuses, proposant aux joueurs jacuzzis et vestiaires démesurés. Le tout pour la modique somme de 3 milliards d’euros (trois fois le budget du Stade de France). En outre, lors des constructions, une idée séduisante est promue : les stades pourront être démontés après la Coupe du Monde et reconstruits dans des pays qui en ont besoin, notamment en Afrique. C’est une façon pour le Qatar de se présenter comme un État non seulement écologique, mais aussi altruiste. De la même manière, la main sur le cœur, le pays devrait héberger plus d’un million de supporters. Pour ce faire, une centaine d’hôtels ont vu le jour. Depuis 2011, l’État Qatari est un chantier monumental, se préparant pour l’événement qui se tient depuis le 20 novembre jusqu'au 18 décembre. Aujourd’hui, nous y sommes.


Néanmoins, malgré les efforts fournis, le Qatar et sa gestion des préparations laissent à désirer. Les questions sociales, environnementales et économiques font débat. En effet, cette 22ᵉ édition de la Coupe du monde de football remporte le record du mondial le plus cher. Si 220 milliards de dollars ont été déboursés, principalement dans la construction des stades, le Qatar est vu comme le “pays de la démesure”. En comparaison, la Coupe du Monde au Brésil en 2014 n’avait coûté (que) 15 milliards de dollars.


Mais qu’en est-il de l’empreinte environnementale, déclarée comme bien trop importante pour les défenseurs du climat ? Si les températures peuvent monter jusqu’à 45 degrés, même en hiver, les stades sont équipés d’un système de climatisation leur permettant de conserver une moyenne de 16 degrés à l’intérieur. S’inscrivant dans un contexte d’urgence climatique, le choix du Qatar par la FIFA est perçu comme absurde et est vivement critiqué. Pourtant, le pays avait annoncé que cette Coupe du monde serait non seulement la première organisée par un État arabe, mais aussi la première "complètement neutre en carbone”. Jouant sur la superficie du Qatar, les autorités mettent en place des lignes de métro et des navettes permettant aux supporters de naviguer dans Doha, la capitale, où se joueront tous les matchs. Alors que cela aurait été impossible en 2018, les spectateurs pourront assister à plusieurs matchs par jour, et ce, sans prendre l’avion. Voilà la neutralité carbone dont se vante l’Émirat. Néanmoins, malgré les chantiers massifs, un manque de logement demeure, forçant certains supporters à se loger dans des pays voisins, comme aux Émirats Arabes Unis. Ils devront donc prendre l’avion et effectuer des vols allers-retours quotidiens. Dès lors, l’empreinte carbone ne peut être nulle.

Ainsi, il est estimé que l'événement émettra 6 millions de tonnes de CO2, soit presque deux fois plus que le chiffre donné par le comité d’organisation. Après une COP 27 des plus décevantes, ce chiffre ne fait pas plaisir à entendre.


À ce propos, le président de la FIFA de 1998 à 2015, Joseph Blatter, déclare dans une interview donnée par le Monde “Pour être sincère, c’est aussi une Coupe du Monde que moi, personnellement, je ne voulais pas tellement”, le pays étant l’un des plus petits pour une organisation des plus gigantesques. Hypocrisie ou dédouanement, nous cherchons encore...

Toutefois, le problème n’est pas qu'environnemental. La question sociale est elle aussi, malmenée. Le salaire moyen des travailleurs (migrants pour la plupart) était de 230 euros par mois, pas la peine de dire que le SMIC est un salaire plus que luxueux en comparaison. De plus, ce chantier démesuré a causé bon nombre de décès : 6 500 décès selon The Guardian, 37 selon le Qatar. The Guardian a enquêté auprès des ambassades du Népal, de l’Inde, du Bangladesh, du Sri Lanka et du Pakistan, mais aussi d’ONG, afin de calculer le nombre de migrants morts entre 2011 et 2020. Une moyenne de 12 morts/semaine est établie pour ces pays. Un flou demeure néanmoins quant aux travailleurs d’autres nationalités dont les chiffres n’ont pu être pris en compte, faute de transparence et d’accès à l’information. De plus, tous les décès ne sont pas forcément liés à l'événement mondial. C’est pour toutes ces raisons que, selon un sondage, 42 % des Français boycotteront le Mondial.


Alors la question est : faut-il politiser le sport ? Notre cher président, Emmanuel Macron, a pourtant été récemment clair sur la question en expliquant qu’il ne fallait pas « politiser le sport ». Et pourtant, le football est une véritable arme de soft power qui acquiert une autre dimension dont le gouvernement qatari souhaite bien en profiter. De plus, une majorité d’athlètes russes se sont vu disqualifier des grandes compétitions, il est donc compliqué d'affirmer que le sport n’est pas politique. Nous sommes aujourd’hui dans un monde où tout est politique. Ainsi, la question du boycott divise les citoyens : pour certains, visionner les matchs est une aberration tandis que pour d’autres, le mal est déjà fait. Alors, pourquoi ne pas simplement boycotter la FIFA ?


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